Kompong Chnang- Annette – De pêcheur à Capitaine


Je l’ai dit souvent, je suis en admiration envers ceux qui se prennent en main qui ont le courage de pousser un peu plus loin leurs limites afin de grandir dans une environnement qui n’est pas toujours facile.  La vie n’est pas facile pour ceux qui se lancent. Mais le plus lourds, c’est la pression, mais surtout les doutes et des questions.  Des peurs, des difficultés à surmonter, et surtout, il faut constamment se battre envers nous-mêmes afin de ne pas succomber au découragement.  Car, la plus grande bataille, c’est contre nous-mêmes.  Car dans ce monde, améliorer son sort signifie de travailler fort, souvent dans l’ombre…. Car le succès que l’on voit n’est que l’infime partie de l’iceberg.  En ce sens, lorsque l’on parle de courage, j’ai une autre belle histoire à vous raconter.  Celle d’Annette.

Annette à la rame

Annette est née dans un minuscule village près de Kompong Chnang, dans une maison en bois, avec ni eau ni électricité ni sanitaire.  Elle a 6 sœurs et frères, et ses parents vivaient de la pêche sur la rivière Tomlé Sap, dans la partie nord-ouest du Cambodge.  Annette tout comme ses sœurs et frères, n’a pas été à l’école, car les parents, beaucoup trop pauvre, avaient besoin de tous pour subvenir aux tâches quotidiennes.  Annette a passé son enfance dans les filets de pêche, sur la petite embarcation de bois, et dans les marchés de Kompong Chnang afin de vendre les fruits de la pêche du jour.  Une vie que vivent ici des millions d’enfants.  Pas malheureusement, c’est juste leur vie.

Un jour, alors qu’Annette était jeune adulte, elle a eu l’occasion de conduire les touristes sur une vieille barque qu’elle a rafistolée sur la rivière afin de voir les villages de pêcheurs flottants sur la rivière.  Connaissant ces villages depuis toujours, c’était facile pour elle de se déplacer dans ce village ou elle connaissait tout le monde.  Rapidement, les villageois qui étaient un peu taciturnes à cette époque, avant l’arrivée plus importante des touristes dans le secteur, tombaient sur le charme de ce petit bout de femme souriante et d’une extrême gentillesse.

Mais Annette est débrouillarde et elle a de l’ambition…. 

*** 

Lorsque j’arrive dans une nouvelle ville, j’ai l’habitude de faire une petite tournée à pied des environs afin de sentir la ville.  C’est important pour moi, d’autant plus que j’aime marcher.  Donc, cet après-midi-là. Les quatre kilomètres qui me séparent de la rivière ne me font pas peur.  Je découvre alors la vie grouillante autour du Lac que forme l’élargissement de la rivière.  Je découvre une vie simple, avec des bâtiments d’une hauteur impressionnante.  Je comprendrai que cette hauteur est nécessaire, car en saison des pluies, la crue est de presque dix mètres de haut. 

Je sors de la route, afin de me promener dans les rues très humbles, ou plutôt les chemins de terre ou les maisons des pêcheurs de retrouvent.  Vraiment de très belle image, vous verrez plus bas les photos. 

En marchant, on découvre ces boutiques de poteries. Vous verrez dans un prochain post que ces poteries sont fabriqués à la main par des villageois autour
Ce n’est pas pour rien que les maisons sont si haute. la crue ici est fantastiques. En 2011 elle a monté jusqu’à un mètre plus haut que le plus haut plancher des maisons. Mais normalement elle monte jusqu’au premier plancher qui devient un quai.
Les petites boutiques du type ou Annette a passé son enfance
Un petit garçon tout comme Annette il y a plusieurs années
Les boutiques que vous avez vu, elle ont au niveau de la rue. ici vous voyez derrière. Et l’eau monte presque jusqu’au palier
petit pont de bois, on Annette m’a fait gambadé 🙂

Nécessairement, étant le seul occidental dans ce secteur, je ne passe pas inaperçu.  Et bien sûr, il y a plusieurs guides improvisés, ou de chauffeur de tuk-tuk qui m’approchent afin d’offrir leur service.  Généralement je décline toujours le premier jour, car j’ai besoin de temps pour me faire une tête afin de savoir à qui je veux faire confiance, ou avec qui je veux passer du temps.  Mais Annette c’était différent…

Elle m’approche en me disant :  

Do you want to see the flotting Village”. 

Je réponds « non merci » comme j’ai répondu des dizaines de fois dans les dernières minutes.  

Mais elle m’a dit quelque chose qui m’a surpris, qui a touché mon coeur.

My name is Annette, and I have my boat.  He is small and I can row around the house and talk to people…” 

Elle avait un éclair de fierté dans les yeux.  Pas juste un peu, mais beaucoup….  

Je reste là immobile…. Mais je commence à être charmé par ce bout de femme.

Voyant que je reste immobile, elle ajoute :  

Do you want to see Annette’s boat?  

Je ne sais pas trop quoi penser… Je l’a suis alors que son petit pas rapide me mène jusqu’à sa petite barque.  Après quelques centaines de mètres à la suivre a travers les petits champs et les maisons, nous arrivons à une petite barque de bois, tout simple, mais avec le regard d’Annette j’ai compris que c’est ce qu’elle a de plus important dans sa vie.  Son bateau à elle.

Annette au loin qui attends avec patience que j’arrive a son bateau

Elle me regarde avec fierté et me dit : « Annette’s boat »

Voilà le fameux petit bateau. Celui dont elle est le plus fière.

Alors je suis conquis.  Je suis dit que je reviens demain et c’est promis.  Généralement, les touristes qui font cela ne reviennent jamais.  Moi je lui dis que je ne suis pas un touriste ordinaire.  Et lorsque je donne ma parole, je la suis.  Elle me donne son numéro de téléphone, et je continue ma route.

Le lendemain, 9 heures pile je la vois au loin faire les cent pas alors que je viens de lui téléphoner.  Nous avons négocié un bon prix, mais je crois que ce n’était pas seulement pour le prix.  Je crois qu’au fond d’elle, elle n’y croyait pas à mon retour.  Mais j’entends sa voix, je sens un petit soulagement.  Elle m’attend avec impatience.  

Et je suis là.  Alors commence mon aventure avec Annette le Capitaine.

Et quand je dis petit, il est petit. je vous avoue que les premières minutes, je me demandais si mon poids n’allait pas le faire chaviré. Mais rapidement j’ai compris qu’Annette est une experte!
Voyez encore la hauteur des maisons. N’oubliez pas l’eau monte parfois jusqu’à cette hauteur
Voilà les premières maisons. Il y a deux villages distinct sur la rivière.
Un des villages est un villages Vietnamiens. Ils parlent le vietnamiens, et se mêlent très peu avec les cambodgiens. Ils sont leur temple confucéens, leur commerce est. Mais ils vendent leurs poissons à la ville
La cuisine est à l’extérieur.
Et vous remarquez le petit poêle en poterie que nous avons vu plus tôt.
Une petite famille du second village
Le second village est une mixité de vietnamiens, de cambodgiens bouddhistes et d’une des ethnies locales que je n’ai pas bien compris le nom.
Ici la vie du village est quotidienne. Le camion qui transporte les poches.
Et Fido qui garde la maison.
Annette a appris à parler l’anglais, le vietnamiens et le Thai avec les touristes qu’elles transportent. Elle ne sait pas lire, mais pour une femme qui appris sur le tas, elle parle vraiment très bien
La vie autour du village
Le quotidien de la pêche
Tout au long du chemin, Annette envoie la main au villageois qui la connaisse depuis toujours. Elle leur parle, leur demande des nouvelles. La vie de village quoi!
Annette manie la rame comme ses ancêtres le font depuis des centaines d’année. Elle a acheté son bateau il y a trois ans. Et pendant 3 ans elle menait les touristes à la rame. Maintenant, elle a pu s’acheter un moteur depuis 2 ans…. « Annette’s boat! »
la vie normale
les pêcheurs
Les magnifiques montagnes derrières
Un petit bout de femme bien inspirante. je lui ai donné 5 dollars de plus que l’on avait prévu. Pour elle, je sentait que c’était un trésor. je ne sais pas ce que l’avenir lui réserve, mais elle aussi elle a de l’ambition. Son bateau lui a couté 500$. Mais elle veut plus. Elle veut s’acheter un plus gros bateau, et être capitaine pour pouvoir transporter 6 personnes à la fois. Et tout cela à coup de 20 dollars par jour..

Merci Annette pour cette belle histoire de courage.

Stephane