Myanmar- Le choc tranquille des cultures

Après 14 heures de bus de Bagan, je voulais vraiment visiter cette région du nord-ouest afin d’y visiter cette étonnante série de temples, mais aussi gouter un peu plus à cette authenticité que tout le monde parle au sujet du Myanmar.  Mais aussi, le Nord-Ouest a des temples, ouvert et véritablement découvert il y a moins de 15 ans, sont ouverts aux visites depuis peu, à vrai dire, depuis 2010 seulement.  Ces temples du XVe siècle sont connus par la population locale depuis toujours, mais au fil des centaines d’années, ils étaient recouverts de forêt, de détritus, de forêt, et enterrés sous les siècles d’histoire.  Seuls les toits étaient visibles, et que tout comme les vieux châteaux européens, furent oubliés pendant des siècles.   C’était pour moi une occasion de voir ces découvertes, pendant qu’elles sont encore ouvertes au public.  Lors d’un prochain post, je vous raconterai un peu plus mes découvertes de Mrauk U, mais avant, parlons de ce « choc tranquille des cultures ».  Mais ces derniers jours m’ont permis de mieux comprendre cette culture complexe, ces contrastes que constituent chacune des cultures, et quelques-unes de ces codes.  Et derrière des habitudes, on comprend mieux une société, pour ceux qui sont en mesure d’écouter au-delà des mots.  Ici c’est facile, il n’y a pas de mots 🙂

Laissez-moi vous raconter

Deux mondes qui se rencontrent

Cette zone nouvellement touristique est ce que j’ai vu de plus authentique au Myanmar, bien que l’authenticité soit la principale caractéristique de ces Birmans, qui comme nous, apprennent les codes touristiques.  Car ces codes, ils sont vraiment très différents, et visiblement, ils apprennent, et ils apprennent vite.  Il ne faut pas l’oublier, les téléphones intelligents sont arrivés au Myanmar depuis moins de 2 ans, et depuis 2 ans seulement, ils ont accès à internet en temps réel.  Un internet rapide pour un pays comme le Myanmar, il n’y a pas encore de restriction internet, et bien sûr le prix, est selon les standards occidentaux très bas.  Mais ces téléphones coutent cher pour les Birmans, par conséquent, contrairement au Cambodge ou ailleurs ou j’ai vu, tous n’ont pas leur téléphone.  Ils viennent de découvrir « candy crush ». 

Tant à Mrauk U, qu’à Mandalay ou Ngapali, les Birmans sont dans ce processus « d’essais-erreur » dans tout.  Ils essaient vraiment de bien faire, tellement que nous ne sommes pas habitués avec tant de sollicitude.  Et contrairement à ailleurs, ils n’ont pas la culture du « pourboire ».  Ici tu payes le montant, et lorsque tu veux donner plus, ils te le remettent.  La seule façon que j’ai eu de leur donner un peu plus dans certains cas, c’était de leur dire que c’était « un cadeau pour les enfants ».  Dans ce cas, ils acceptent.

Autre élément, tout comme j’ai pu voir au Cambodge, ils sont « extrêmement réactif » lorsqu’on leur dit quelques choses, et même lorsque l’on ne leur dit pas.  

Par exemple, ici à Ngapali, il y a une affiche qui offre des services de tour de bateaux avec des pêcheurs.  Hier matin, j’ai demandé plus d’informations en pointant les affiches.  Elle m’a donné les informations verbalement.  Mais ce matin, à 8h30, un camion est arrivé, avec deux étagères toutes neuves, et je viens de voir arriver quelques feuilles et brochures en quantité, fraichement sorti de l’impression, qu’ils mettront sur les armoires. 

La plage de Ngapali

J’ai perdu mes lunettes soleil à Mrauk U, je cherchais des lunettes.  J’ai demandé à la réception ou je pouvais en trouver.  Alors j’ai pris un vélo et j’ai parcouru ce village minuscule village de Ngapali beach.  Ce « village » ne comprend véritablement qu’une dizaine d’échoppes.  Pour avoir plus, il faut faire une quinzaine de kilomètres, il y a une ville plus importante.  Donc, j’ai fait à vélo cette petite dizaine d’échoppes hier pour en trouver.  J’en ai finalement trouvé une paire après la dizaine.  Car ici, vous le remarquez bien, seulement les Occidentaux ont des lunettes de soleil.  Les locaux eux n’ont pas.  Mais ce matin à la réception de l’hôtel, il y a 5 paires de lunettes soleil à vendre à la réception.

Au sujet de ma paire de lunettes, je marche dans la rue de Mrauk U et un vieux bonhomme m’interpelle en birman.  Après quelques échanges et il pointe mes lunettes de soleil.  Je les enlève et lui montre.  Il les prend et spontanément, il les met.  Je prends une photo avec lui en riant.  Il se retourne ensuite, et il s’en va avec mes lunettes.  Je crois qu’il avait compris que je lui donnais.  Comme je marchais dans sa direction, alors qu’il était à une dizaine de pas devant, il me pointait quelques personnes en me disant des choses en birman d’eux.  Je n’ai rien compris de ce qu’il racontait vraiment, mais il était content.  Donc, en fait, je me suis dit que j’ai rendu une personne heureuse.

L’homme avec mes lunettes. Une belle photo qui valait bien le prix des lunettes!

Le service de nourriture ici est excellent, voir des fois un peu trop.  Ils ont de la difficulté à doser le niveau de service.  Lorsque tu commandes, ce n’est pas un serveur qui est là, mais cinq.  Tu entres dans une boutique, ils te suivent « pas à pas » question d’être toujours dispo pour une moindre question.  Ils veulent vraiment très bien faire.  Mais ce qui ne savent pas encore, c’est que nous sommes habitués que dans les pays en voie de développement, cette pratique peut être vue comme agressante, car nous sommes trop habitués d’être constamment sollicités, et que pour beaucoup d’occidentaux, « trop de service » veut aussi dire « je dois payer plus et trop ».

Au sujet des quantités, au Myanmar, les quantités pour les invités sont « grandes ».  Et tu le vois un peu partout, à part les personnes très pauvres des villages, ici, on ne manque pas de nourriture.  Le Myanmar est rempli de victuailles, et même les plus pauvres mangent généralement bien.  En fait, la plupart des familles ont des terres et une partie de la famille travaille sur la terre.  Oui certainement, il y a des gens plus pauvres que d’autres et oui dans des régions reculées c’est plus difficile.  Mais à ce que je peux voir, le Myanmar est un pays riche.

Donc en ce sens, les portions sont gigantesques, et cela un peu partout.  Et j’ai compris qu’ici, il ne faut pas finir son assiette, car si l’on termine tout, c’est qu’il n’y avait pas assez.  En regardant les locaux manger dans le village, et en observant les personnes dans les bus ou lors des arrêts, on voit bien que les gens en laissent, et plus particulièrement les puissants.  Plus tu en laisses dans ton assiette, plus tu gagnes le respect des autres.

À ce sujet, j’ai mangé avec un birman lors que mon voyage en bus entre Mrauk U et Ngapali dans cet arrêt de bus.  Il parlait un peu l’anglais, et malheureusement l’internet n’était pas très bon pour utiliser « google translate » dans la montagne.  Il m’a dit qu’il était « computer technician » et selon les standards birmans.  Comme nous étions dans le « VIP BUS » entre Mrauk U et Ngapali, je présume qu’il faisait partie de la nouvelle génération de la classe moyenne.  Je dis classe moyenne, car ici, comme ailleurs, les très riches se promènent en voiture avec chauffeur.  Mais dans le Nord-Ouest, il n’y a personne avec des voitures, et les plus riches de Yangoon ne vont pas dans cette région.  Comme partout ici, ce technicien avec sa femme et son bébé se promenait avec une liasse impressionnante d’argent, qu’il cachait tant bien que mal dans ces différentes poches de son manteau.  Et bien sûr, il était très fier de me montrer son téléphone Samsung, qu’il disait trop vieux qu’il faut qu’il change.  Mais tandis que nous mangions en silence, on regardait la télé, et il m’expliquait que c’était la cérémonie des oscars birmans à la télé.  Il a commandé deux fois, et il a laissé le reste de la nourriture.  J’ai compris que c’était important pour lui de me montrer qu’il était gentil, accueillant, mais qu’il voulait gagner mon respect.  Ce que j’ai fait.  Il a bien sûr payé le repas. C’était important pour lui.  Un peu plus tard, j’ai payé sa « chique », car je voulais lui témoigner aussi mon respect.  Nous sommes retournés dans le bus.  Nous voulions nous contacter sur Facebook, mais l’internet n’a pas permis.

Le « computer technician »

Ici aussi, il y beaucoup moins la culture du « marchandisage » que l’on retrouve au Vietnam ou au Cambodge. Pour nous occidentaux, c’est beaucoup plus facile, car on sait que le prix qu’ils te demandent est généralement le « juste prix ».  Et lorsque tu essaies de le faire (comme il faut le faire ailleurs en Asie), tu vois bien que c’est contre-culturel pour eux.  Donc, tu cesses et c’est parfait.  Au Myanmar, ce qui ressort est que nous nous sentons oui occidentaux, mais aussi partis de cette société.  Ils agissent avec nous comme ils agissent avec les autres avec les bons et les moins bons côtés.

Ils apprennent aussi ce que les touristes veulent, et comme j’ai passé beaucoup de temps avec les locaux (les vrais locaux dans les bus et les villages) je peux constater comment ce n’est pas évident pour eux d’entrer dans ces nouveaux codes.  Que ce soit dans les bus, ou à Mrauk U, j’étais véritablement le seul occidental et dans pas mal de cas, le premier Occidental qu’ils voyaient.  Alors dans ces cas, c’était moi l’étranger et j’ai vraiment essayé fort d’entrer moi-même dans leurs codes.  Et ces codes ne sont pas les mêmes. 

Une échoppe typique et normale au nord.

Contrairement au Cambodge et au Vietnam, les prix des bus pour les Occidentaux sont les mêmes que pour les locaux.  Donc, ce qui fait que même si tu es occidental, tu n’as pas de faveur dans le transport.  Aussi, il faut comprendre qu’au Cambodge et au Vietnam, les prix des autobus sont souvent calculés sur le « total que le bus rapporte ».  Ainsi, si les Occidentaux payent plus, le chauffeur et son adjoint peuvent se permettre d’avoir quelques places vacantes, car les Occidentaux ayant payé plus, le bus est rentable pour eux.  

Le jeune manager du bus qui surveillent les clients potentiels

Mais lorsque tu es dans un autobus normal, ils cherchent constamment à remplir les places disponibles.  Ce qui ajoute à la longueur du trajet.  Car à tous les villages, il y a des gens qui attendent au bord de la route, afin qu’un bus s’arrête pour les transporter.  Donc, le bus arrête, demande où va la personne, lui charge un montant et elle monte.  Et comme le bus est la colonne vertébrale des échanges, ces personnes montent avec leurs paquets, leurs victuailles et quelques fois, des poules, les œufs, les cartons.  Enfin tous de la vie normale quoi.  Ce qui fait que régulièrement sur les longs trajets, il y a un va-et-vient de personne qui entre et qui sort.  Et s’il manque de place sur les sièges, on installe des petits bancs en plastique dans les rangées.  On optimise les espaces, on optimise les trajets.  C’est comme cela.

Mais aussi, j’ai aussi compris que pour certains, cette arrivée d’Occidentaux n’est pas toujours aussi bienvenue que nous pourrions le croire.  J’avais raconté l’histoire des deux hommes birmans qui m’avaient bousculé pour s’imposer à moi, ou de la matrone qui faisait des crêpes qui a refusé de me servir.  C’est cela aussi le Myanmar.  Si on ne veut pas servir les touristes blancs, on ne le fait pas, et on se fout un peu des considérations matérielles et de l’argent des touristes.  En fait, ce n’est parce que tu as de l’argent, ou je pense que tu en as, que je suis obligé d’être gentil.  Je peux être bête et méchant et c’est ok.

Les bus entassé lors du ferry.

Les hommes et les femmes

Je parlais de code, lorsque l’on est assis dans un endroit restreint, inévitablement tu te piles les pieds, ou certaines personnes tentent de faire leur place en te poussant, ou déplaçant des affaires.  C’est là que les codes sont importants à comprendre.  Car oui, il faut laisser aller, mais ici comme ailleurs, il y a des gens qui ambitionnent, plus particulièrement les hommes.  Car à ce jour, je remarque que les hommes et les femmes birmanes sont très différents.  Les femmes birmanes sont vraiment très gentilles et polies. Elles sont avenantes, maternelles, au-devant des souhaits, et tentent vraiment de te rendre heureux.  Plus particulièrement les plus jeunes.  Les matrones c’est différent.  Elles ressemblent plus à des hommes dans leur façon de faire.  Mais les hommes, surtout en face d’un autre homme d’un certain âge blanc, doivent souvent montrer que « c’est eux les mâles alpha ».  Donc, oui on fait le dos rond, mais pas trop.  J’ai remarqué que si je faisais trop le dos rond, je n’étais pas respecté.  Alors, doucement et tranquillement, sans me fâcher, je dois être quelquefois ferme dans mes demandes.  Dans ce cas, j’ai gagné une forme de respect.  Ici un homme est un homme.  Il n’est pas nécessairement gentil tout le temps, et il gère les rapports de force.  Il est protecteur, et dois protéger son territoire.

Durant le transport, il y a de nombreuses personnes qui vendent des victuailles sur la route
Et bien sûr, plusieurs dont j’ai aucune idée de ce que c’est.

Je l’ai bien compris dans mes heures d’autobus.  Oui quelques femmes dans le bus, mais beaucoup d’hommes qui expriment leur façon de faire et de voir.  Le bus pendant 16 heures est un peu un microcosme de la société dans laquelle ils habitent.  Nous sommes dans un endroit restreint, ou plein d’hommes tentent d’imposer leur loi.  Les discussions peuvent être musclées et même l’espace des épaules avec mon jeune, et pourtant très frêle à côté de moi, étaient une bataille afin de prendre le plus de place possible.  Il voulait me montrer qu’il ne se laisserait pas imposer ma présence.  Les coups de coude ont été nombreux alors que je tentais de me faire le plus discret possible.  J’ai essayé de l’amadouer en partageant mon repas, qu’il a refusé.  Après 8 heures de bus à me faire « cross checker » par ses coudes dans mes cotes, j’ai pris alors ma place en imposant ma stature.  Il a par la suite arrêté, et la fin de voyage s’est bien passée.  Il m’a même salué à la fin.  Mais tant que je n’avais pas fait cette prise de force, il cherchait à s’imposer sur moi.  

Le chef du bus, un homme expressif et directif m’a bien fait comprendre, à moi et les autres du bus, que c’est lui qui dirigeait.  Alors que l’un des passagers a explosé vers minuit le soir au sujet d’un sujet que je n’ai pas compris, le chef l’a sorti de son bus avec sa famille dans le noir.  J’ai compris que l’autre homme voulait descendre, mais pas à cet endroit.  En tout cas, c’était impressionnant de voir ce débat, à minuit le soir dans le noir, dans la montagne birmane.   Pendant la nuit, lors d’un contrôle de routine, j’ai cherché les toilettes pour me soulager.  Il m’a pointé le bois plus loin.  Alors que je me dirige pour aller dans le bois et je commence à m’installer, il me crie quelques choses en me faisant signe d’aller plus loin.  C’est alors que j’ai compris qu’ici, tu peux te soulager dans la nature, mais il ne faut pas que les autres te voient…

Ces hommes sont très différents envers les enfants, les femmes et les familles.  Ils sont devant les familles très affable, et vraiment protectrice.  Une chose est certaine, la Birmanie a une culture patriarcale, alors que le Vietnam a une culture matriarcale.  Ça change les rapports et les réactions.  

J’ai eu beaucoup d’échanges avec des Occidentaux qui sont venus ici, et je constate que mon œil et mon contact est différent des autres qui sont venus ici.  Il y a peu d’hommes en « solo » qui sont ici.  La plupart sont en couple ou en famille.  Les femmes en solo sont plus nombreuses, et comme les Birmans tant homme ou femme ont un respect pour les femmes et les enfants, leurs interactions gentilles arrivent vite. 

Un pont de bois, ou le bus passe tout juste

Mais à ce jour, je suis le seul occidental masculin à voyager seul que j’ai croisé.   Mais avec un homme en solo, cela prend un peu plus de temps.  Donc, pour eux, c’est aussi différent.  Et je dois avouer que bien qu’ils soient très discrets, et ne pose jamais la question, ils se demandent ce que je fais ici seul.  Ils me demandent si j’ai une famille, une femme et des enfants.  Je garde ainsi précieusement ma photo de famille de Facebook que je montre à tous.  Lorsqu’ils ont compris que je ne suis pas « un pédophile », un « pervers en mal d’exotisme » un « business man » ou un « vendeur de produit illicites  » et que je suis une personne normale, avec une vie normale et que je suis ici afin de mieux comprendre ce pays et cette merveilleuse culture, ils sont ouverts et heureux. 

Un trajet à l’image du nord-ouest du Myanmar.

Pour finir, voici ce que signifie le « lacher prise » lorsque l’on visite le Myanmar.  Voici la petite histoire de mon premier 14 heures entre Bagan et Mrauk U

J’ai pris mon billet à l’hôtel de Bagan, ou la gentille organisatrice m’a trouvé des billets.  Elle m’a dit de lui faire confiance, ce que j’ai fait, car je n’avais pas trop le choix.  J’ai compris pourquoi elle m’a dit de lui faire confiance plus tard.

Le fils du chauffeur qui est venu me chercher

Un premier camion avec des sièges derrière me cueille à l’hôtel à peu près à l’heure convenue vers 18h15.  Après deux mois dans la région, j’ai appris que c’est la pratique qu’un premier transport vient te chercher à l’hôtel afin de te mener à la gare centrale de bus qui est généralement à l’extérieur de la ville.  Jusque qu’ici, tous va bien.

Le camion de gauche est le transport typique de la classe populaire au Myanmar

J’arrive à la gare de bus ou j’apprends que je dois descendre 30 minutes plus tard, dans une ville que je ne connais pas afin de prendre un autre bus…. Le gars me dis « If there a problem call me… ».  Je me dis « ok jusque là ce n’est qu’un transport »  En fait, je n’ai pas le choix.  Ça été compliqué à avoir ce billet.  Trente minutes plus tard, je descends à cette ville ou personne ne parle anglais et personne ne m’attend.  Je n’ai aucune idée de ce qui se passe.  Alors je me dis « lâcher prise, ca viendra ».  Je m’assois sur un tabouret et commence attendre que quelque chose se passe.  Étant le seul occidental dans le coin, il y a certainement quelqu’un qui va annoncer ma présence.  J’ai compris ici que l’information n’est jamais secrète.  Tout le monde te voit.  C’est comme si tu avais une sirène sur la tête.  Donc, je me dis qu’il se passera quelque chose.

Quinze minutes plus tard, un tuk-tuk s’arrête devant moi, et une matrone en descend pour me dire que c’est elle qui s’occupe de moi.  Je me dis alors encore une fois « C’est ce qui se passe, il faut lâcher prise… Rien de mal ne se passera ».  J’entre dans le tuk-tuk et nous arpentons les rues étroites de cette ville dont je ne connais pas le nom.  Elle s’arrête régulièrement parlant à plein de gens.  La seule chose que je comprends est « Mia Ou » ce qui est la ville où je vais.  Le reste, je ne comprends pas.  Je crois qu’elle me cherche un bus, comme les autres birmans le font au bord de la route.  Après une tournée qui a dû durer 20 minutes, elle me laisse à son « échoppe » et me demande de l’attendre là.  Il est maintenant 20h30.

L’échoppe

J’attends alors dans le fond d’une échoppe qu’il se passe quelque chose.  Et c’est là que j’ai compris que j’étais vraiment sous bonne protection.  Le patron et ses deux garçons sont toujours à quelques mètres de moi, et me regardent en souriant.  Dès que je me lève pour aller devant l’échoppe pour voir ce qu’il y a vendre dans l’échoppe, le fils me suit.  Personne ne parle anglais, et ils ne savent pas lire le birman.  Mais c’est un drôle de sentiment de surveillance et de sécurité. Libre, mais pas trop.  Une attente, sans trop savoir ce qui se passe, qui dure une bonne heure.  Pendant ce temps, les hommes qui s’occupent de moi me demandent régulièrement si je veux quelque chose, ils m’offrent du thé que je prends (qui n’était vraiment pas bon) et m’offre de la chique (que je refuse).  Les jeunes filles sont avenantes, et m’offrent des friandises que j’insiste pour payer.

Une heure plus tard, la matrone revient avec un bus, on me dit que c’est là que je dois aller.  Mais dans ce bus, une autre « jeune matrone » n’est pas contente de me voir, et me place dans le pire endroit du bus, dans une allée, ou je ne serai pas capable de tenir 14 heures accroupi. Doucement, avec gentillesse, je lui montre mon billet qui ne veut rien dire pour elle question de valider si c’est ok. Elle se fâche, jusqu’au moment où les deux matrones se mettent en discuter fort.  Après quelques minutes, je me retrouve dans une place « honnête » pour la route.

Tout au long du chemin, la jeune matrone me bourrasse.  Visiblement, elle n’est pas contente que je sois là.  La maman pas très loin de moi me fait des sourires avec son jeune bébé alors que le monsieur à côté de moi prend tout ses aises afin de me compresser sur mon siège.  À ce moment, je n’avais pas compris le sens du respect avec les hommes.  Mais lui, après quelques échanges de nourriture, il s’est ravisé et nous avons fait un bon voyage, mais toujours avec l’œil hostile et finalement bienveillant de la jeune matrone. Ce n’est perso, c’est juste qu’elle avait la responsabilité de son autobus. Partout, tout le temps, et pendant les 14 heures.  Dès que je quittais le bus, quelqu’un me suivait tant aux toilettes, qu’au restaurant.  Et si je restais plus loin de 10 mètres, quelqu’un me demandait de me rapprocher.  Une sécurité rapprochée bienveillante.

Une photo a la sauvette de la jeune matrone


Mais aujourd’hui, dans cette zone de Ngapali et après un autre 16 heures de bus, j’ai quitté cette région, ou tout se passe vraiment bien.  Cette pause me permet prendre du recul sur les derniers jours et d’en comprendre un peu plus de ce peuple.  Trois jours impressionnant du côté humain, et magique au niveau des vues et des temples, dont je vous parlerai lors d’un prochain message. 

Bonne journée à vous

Stéphane